17 déc. 2012

LES MATRIOCHKAS ANIMALES

Les tribus animales (1)
Vertige sans cesse renouvelé des poupées russes du vivant où tout est subtilement intriqué l’un dans l’autre, l’un avec l’autre : les emboîtements se chevauchent, s’interpénètrent et se recouvrent, les échanges sont multiples et sont constants. Les limites ne se contentent pas de définir les systèmes qu’elles cernent, elles permettent la naissance des systèmes de rang supérieur. Difficile de savoir où l’un commence, et l’autre finit.
Yongey Mingyour Rinpotché dans le Bonheur de la méditation, écrit : « Ma main n’est pas mon moi, mais elle est à moi. Bien, mais elle est faite d’une paume et de doigts, elle a une face supérieure et une face inférieure, et chacun de ces éléments peut être décomposé en d’autres éléments comme les ongles, la peau, les os, etc. Lequel de ces éléments peut être appelé « ma main » ? »
Dans les animaux qui vivent de longues années, la naissance et la mort des cellules est incessante : les cellules épidermiques sont recyclés toutes les deux semaines les globules rouges ne durent que quatre mois… Ainsi tout animal n’est jamais le même, et à la fin de sa vie, aucune des cellules qui le composent n’était là à sa naissance.
La multiplicité des emboîtements à l’intérieur d’un animal et la constance du renouvellement sont un changement de degré, mais non pas une rupture par rapport au végétal : tout ceci se trouvait déjà au temps du végétal, un animal est juste un système globalement plus sophistiqué, et constitué de beaucoup plus de sous-systèmes et de réseaux enchevêtrés, qui évoluent continûment.
La rupture vient d’ailleurs, d’un nouveau type d’emboîtement, généré par une nouvelle propriété : l’animal acquiert progressivement une capacité étrange qui va littéralement révolutionner la conception des poupées russes du monde.
Jusqu’à présent, pour qu’une nouvelle propriété émerge et transforme une collection en un emboîtement, il fallait que ses constituants soient physiquement soudés. La colle initiale était faite par le cocktail des forces nucléaire, électromagnétique et gravitationnelle. La vie végétale avait apporté la colle chimique, les cellules étant reliées par ses membranes qui, à la fois, les délimitaient et les réunissaient, et au travers desquelles se faisaient les échanges.
Voilà qu’avec les animaux, naît la colle sociale…
(à suivre) 

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