10 avr. 2012

LA SCHIZOPHRÉNIE DES DIRIGEANTS : PRÉDATION OU COOPÉRATION ?

Comment prôner le contraire de ce que l’on fait et est ?
Aller plus vite que le concurrent, sortir le meilleur produit, mieux protéger ses innovations contre les agressions de la compétition, savoir débaucher un cadre clé pour se renforcer et en même temps affaiblir l’autre… L’art du management est peuplé de ces histoires guerrières où il s’agit de se battre contre le reste du monde et d’en ressortir gagnant.
Le dirigeant, lui-même, pour arriver au sommet, a dû écarter bien des prétendants. Souvent, il lui a fallu « tuer » certains qui étaient entrés dans l’entreprise en même temps que lui, des alter ego, des « frères » devenus gênants et encombrants. Peu de place est laissée à la coopération et à l’entraide dans la conquête du pouvoir.
D’ailleurs, se sont développés ces dernières années des liens entre les écoles de management, et les écoles militaires. On voit ainsi de futurs managers s’initier au combat rapproché et aux différentes techniques guerrières. (1)
Bref, la plupart des dirigeants ont été dressés à être des prédateurs pour leur entreprise et pour eux-mêmes.
Or simultanément, se développe un discours en faveur de la coopération, de l’échange et de la confiance dans les entreprises. Le monde est devenu trop complexe, trop changeant, trop incertain pour que la performance repose l’individualisme. On en appelle à l’esprit du rugby, du pack, du collectif, versus l’esprit du football, du génie individuel, de l’égoïsme.
Ces dirigeants prédateurs se retrouvent ainsi à donner des leçons à l’attention de leurs collaborateurs pour mieux travailler ensemble, savoir tirer parti des énergies collectives, partager les informations et ne pas les accaparer.
Dangereuse schizophrénie qui décrédibilise leurs discours et leurs actes, et devrait, pour ceux qui ont gardé l’âme de leurs débuts, les amener à réfléchir…
Comment en effet recommander le contraire de ce que l’on fait soi-même ? Comment imaginer que l’entreprise deviendra un lieu de l’échange et de l’épanouissement si le modèle donné au sommet est celui du mercenariat et de l’individualisme ?
Ces situations de « déchirés » ne sont jamais durables. Repensez donc à Chimène qui, dans le Cid, aime Rodrigue qui vient de tuer son père. L’histoire finit mal…

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