9 déc. 2009

NOUS N’AIMONS PAS L’INCERTITUDE

Nous refusons l'idée d'être né pour rien (incertitude 4/5)

Ainsi plus l'évolution avance, plus l'horizon du flou se rapproche. Qu'est ce que je veux dire par horizon du flou ?
J'appelle « horizon du flou », cet horizon à partir duquel il est illusoire de vouloir prévoir. Au sein de cet horizon, on peut non seulement identifier quels sont les chemins futurs possibles, mais on peut prévoir l'évolution en probabilisant les trajectoires possibles. Au-delà, on ne peut plus qu'identifier les chemins possibles, on n'a plus aucune idée du futur, car il est impossible de même affecter une probabilité aux différentes trajectoires possibles.
Cet horizon est celui du passage à l'incertitude : avant je peux prévoir, après non.
Or plus nous avançons, plus il se rapproche. Finalement, on peut donc dire que l'incertitude, en ce sens, est un moteur de l'univers.
Or cette incertitude, nous ne l'aimons pas : nous la craignons, nous la fuyons. Nous restons tous persuadés que plus nous allons avancer, plus nous saurons de choses. Affirmer haut et forme que l'on ne sait pas ce qui va arriver, c'est le plus souvent être perçu comme un incompétent ou, pire, comme un menteur.
 
En mars 2009, j'ai publié sur mon blog et sur le site Agoravox, un article : « Ciel, je suis né par hasard et pour rien ». Dans cet article, j'y expliquais de façon succincte pourquoi l'évolution suivait un chemin incertain et impossible à prévoir : nous pouvons construire un chemin qui explique comment nous avons pu naître, mais ce n'est possible qu'a posteriori. Nous pouvons reconstituer la succession d'événements qui nous a d'abord rendus possibles, puis ce qui a fait de ce possible, ce qui est advenu, le rendant ainsi certain. 
Mais comment savoir a priori que nous allons exister et pour faire quoi ? Impossible. Trop d'interactions, trop d'aiguillages : trop de matières inertes qui suivent la loi de l'entropie et qui vont vers toujours plus de désordre ; trop de végétaux qui respirent et échangent sans cesse ; trop de « gazelles qui peuvent aller à gauche ou à droite » ; trop d'humains qui n'en font qu'à leur tête.
Nous ne sommes qu'un résultat contingent.
A la question « Pourquoi sommes-nous là ? », j'ai l'habitude de répondre : « Parce que nous sommes là ». En effet, puisque nous existons, puisque, par construction, nous nous trouvons sur le chemin de ce qui existe, la question de notre existence ne se pose pas vraiment. Quant au « pourquoi », c'est une question sans fin.

Tel était donc le propos de mon article. 
Compte-tenu du sujet, je m'attendais à des réactions, mais je fus surpris de leur nombre et surtout de l'intensité de celles-ci : la plupart refusaient cette idée de l'incertitude et du hasard, et pas seulement pour des raisons religieuses. Tous affirmaient que l'incertitude n'était pas le moteur du monde et de la source de la liberté, mais le témoin d'un manque de connaissance et la source de leurs inquiétudes : l'incertitude vécue plus comme une malédiction que comme une ouverture.

(à suivre).

1 commentaire:

Castor junior a dit…

De passage sur ce blog un jour d'exaspération liée aux transports, je me dis que les foules n'ont pas bougé depuis le Bon et déteste toujours l'incertitude qui se rapproche du risque, et ça n'a guère évolué depuis que Ulrich Beck la dépeignait.
Très frais, ce blog, par ailleurs.